L’ASCA et la canne dans le journal Le Monde

Un article rédigé par Mouna El-Mokhtari, sur la Canne de combat et notre club, l’ ASCA, a été publié l’an passé dans LE MONDE et également sur le site web lemonde.fr dans la rubrique SPORT ET FORME du 5 septembre 2012 (à 11h5900).

En voici le contenu, en remerciant une nouvelle fois la rédaction du Monde pour ce coup de projecteur qui nous permet de préparer la saison prochaine !!!

YES WE CANNE !

Je fais de la « canne de combat », me dit un soir un copain, accoudé au comptoir. Etant plutôt du genre à m’empaler avec mon propre parapluie, je lui ai resservi un verre pour qu’il me raconte en détail sa lubie. « C’est un sport qui vient du XIXe siècle, m’a-t-il expliqué. A cette époque, la canne faisait partie en France de la garde-robe masculine et pouvait servir d’arme en cas d’attaque… C’était l’arme des gentilshommes en quelque sorte. Tu veux essayer ? », a-t-il lancé comme par défi. Il m’a tendu un verre et j’ai répondu : « Banco ! »

Quelques jours plus tard, un peu intriguée, je me présente à un cours. Je n’ai vraiment rien d’un gentilhomme du XIXe siècle, mais, devinant l’honnête sportive, Frédéric Morin, président de l’ASCA, l’Association sportive de canne d’arme de Paris, et professeur de canne et de bâton m’accueille très chaleureusement. J’entre un samedi matin dans le gymnase Rigal du 11e arrondissement de Paris et découvre mes camarades de jeu en jogging-baskets. Ouf ! Je suis raccord. Des jeunes d’une dizaine d’années côtoient des adultes qui sont en âge d’être leurs parents. Un père s’entraîne même avec son fils. Le sourire aux lèvres, Frédéric Morin lance l’entraînement sans tarder.

UNE TIGE DE CHÂTAIGNIER D’ENVIRON 90 GRAMMES

La séance commence par une petite course classique d’échauffement. On monte les genoux, on touche ses fesses avec les talons, on effectue des pas chassés. Puis on court avec une canne à la main, soit 90 grammes de châtaignier. C’est là que ça se corse : le professeur commence à nous demander de faire des moulinets ! De la main gauche, puis de la main droite, toujours en courant. Dans le sens des aiguilles d’une montre, puis dans l’autre. Droitière, j’ai l’impression que ma main gauche se venge de toutes ces années où je l’ai dédaignée, voire méprisée. Moulinets d’une main puis de l’autre au-dessus de la tête – genre hélicoptère -, toujours en courant. L’affaire se complique encore quand, dans la course, le professeur nous demande de faire une flexion et d’enchaîner sur une volte-face tout en passant la canne dans le dos par l’épaule. Je manque à plusieurs reprises de m’écrouler et cela fait à peine un quart d’heure qu’on s’échauffe…

>> Retrouvez un article et une vidéo de cette discipline sur le blog Au Tapis!

Heureusement, voici venu le temps de nous réunir en cercle au centre de la salle. Frédéric nous demande de mettre de côté les cannes, de prendre un masque et de nous mettre par trois. A la mine déconfite de mes camarades, je devine qu’un exercice difficile nous attend. Les fameux masques sont en fait des masques d’escrime, matelassés au niveau du cou pour protéger des adversaires pendant les assauts. Mais il ne s’agit pas de les porter… Il faut s’asseoir en petit cercle, jambes en l’air, et se passer le masque de 1,5 kg par le côté afin de faire travailler les abdominaux.

UN SPORT CODIFIÉ PAR MAURICE SARRY

Ça fait mal, ça brûle… Au bout de cinq minutes de cet exercice harassant, je me relève avec l’aide d’une partenaire. C’est le moment d’apprendre à vraiment se servir de la canne et… à appréhender vraiment les différents coups qui peuvent être portés. « En place pour le salut, prêts pour le salut… Saluez ! », s’écrie le prof. Pieds joints, la canne tendue devant soi, on exécute un moulinet à droite (pour les droitiers), un autre à gauche, et on termine dans la position de départ. Dans ce sport, six coups, toujours armés, c’est-à-dire préparés, peuvent être donnés à son « partenaire ». Car la canne, telle que l’a codifiée dans les années 1970 le boxeur Maurice Sarry, n’est pas un art martial mais un sport de combat. Le but est de toucher son partenaire, pas de lui porter un coup. Latéral extérieur ou croisé, brisé, enlevé, croisé tête ou croisé jambe, Maurice Sarry a pensé ses six coups comme… les cordes d’une guitare.

A plusieurs reprises, je fais tomber ma canne lors d’un moulinet de préparation. Celle-ci heurte le sol puis roule, roule, roule… En me déplaçant par petits pas chassés, je la récupère discrètement. Le bon côté des choses, avec une discipline aussi confidentielle que la canne de combat, c’est que la solidarité et l’entraide sont devenues une seconde nature chez mes camarades, qui me sourient pour m’encourager.

ETAT D’ESPRIT

Je n’abandonne pas la bataille et, à force de répétitions, mes mouvements deviennent plus fluides : je commence à mémoriser cette élégante chorégraphie. Pour parfaire l’apprentissage, le professeur nous demande de mimer lentement un assaut avec un partenaire. Je commence à regretter de m’être lancée dans l’aventure (je ne boirais plus jamais de bière, c’est fini !) et me demande si je ne vais pas me faire bastonner. « Respect, courtoisie et non-violence » sont les valeurs fondamentales de ce sport, me rassure Frédéric en appuyant son clin d’oeil.
C’est donc dans cet état d’esprit que, chacun à notre tour, nous enchaînons quatre coups différents en essayant de varier les combinaisons. La beauté du geste parfaitement exécuté masque l’effort de toucher son partenaire au niveau de la tête, du flanc ou du mollet, parfois à l’aide de fentes avant ou arrière.
A mesure que ma maîtrise des coups progresse, je peux entendre le doux son de la canne qui fend l’air, surprendre mon partenaire, l’obliger à reculer, à enchaîner les parades franches ou à bondir brusquement pour esquiver mes coups. Tous les pratiquants sont concentrés, le festival de cannes bat son plein.

Pour mieux ancrer notre pratique sportive dans nos quotidiens, le professeur nous demande ensuite de choisir une combinaison de trois coups préférés et d’en travailler l’enchaînement : « L’objectif est de maîtriser une série qui permettra de se rabattre sur un assaut bien connu en cas de situation de combat. » Je m’arrête un moment pour observer l’affrontement de deux élèves confirmés : voltes, bonds, déplacements, ces deux-là sont captivants tant ils se livrent un combat distingué. Ce sport, qui met en avant une certaine élégance, fait une large place à l’expression de soi et à l’inspiration.

La séance se termine par une série d’étirements : tout le corps est concerné car « l’ensemble des chaînes musculaires est utilisé pour donner un coup », précise Frédéric Morin. Mollets, cuisses, adducteurs, dos… je sens que je vais avoir de sacrées courbatures ! Nous multiplions ensuite les moulinets – sans canne, à ma grande déception – pour entretenir les articulations. Puis je salue une dernière fois mes partenaires. « La progression est rapide avec ce sport, et je reviendrais bien la semaine prochaine », ai-je pensé en quittant la salle. Comme quoi, tout est possible.

Mouna El-Mokhtari


Un équipement rudimentaire pour commencer

Pour pratiquer la canne ou le bâton, mieux vaut s’inscrire dans un club. La canne est fournie et, pour une pratique loisirs, un simple survêtement et des baskets suffisent.

Il existe trois catégories de canne, utilisées en entraînement en fonction des exercices : la canne « verte », la plus lourde (de 150 à 200 grammes), sert principalement pour s’exercer au maniement ; la canne « rouge » est plus légère ; la canne « noire », la plus légère (de 100 à 125 grammes), est celle qui est employée en compétition. Elle se brise facilement si le coup est porté trop fort.

Cette dernière fait 95 cm de long et 1,5 cm de diamètre. Elle se compose de trois parties. Le manche (ou le talon) qui occupe les 15 premiers centimètres et vous permet de saisir l’arme. La surface de parade qui mesure 60 cm. Il y a enfin la pointe, sur les 20 derniers centimètres de la tige, qui constitue la surface de touche.

Si respect, courtoisie et non-violence sont les valeurs fondamentales du combat de canne, il peut arriver qu’un coup soit donné trop violemment dans des circonstances exceptionnelles et bien à l’insu de votre plein gré ! En compétition, le canniste se pare donc d’un masque d’escrime et de gants matelassés, de protège-tibias et d’une tenue composée d’une veste et d’un pantalon matelassés. Pour les hommes, la coquille est de rigueur tandis que les femmes pourront apprécier de porter un plastron pour protéger leur poitrine. Tout ce matériel peut heureusement être prêté dans certains clubs.

Quand et où pratiquer ?

Sachez qu’il existe différentes pratiques de ce sport. La canne d’arme, dite de combat ou sportive, telle que je l’ai essayée, est enseignée dans des clubs. L’Association sportive de canne d’armes (ASCA) est une bonne adresse pour découvrir un club près de chez vous (site Web : Batoncanne.com). Vous pourrez aussi pratiquer la double canne (une dans chaque main, mais si, mais si…), la canne fouettée, la canne self-défense, la canne-ball (en équipe, avec une balle) ou la canne artistique.

Les associations sportives organisent parfois des cours de « bâton », une discipline plus confidentielle encore. On y retrouve les six coups de la canne agrémentés de coups « coulissés » et « piqués » avec un morceau de bois plus grand (1,4 m) et plus lourd (entre 450 et 500 grammes) et saisi à deux mains.

Voici enfin le lien sur le site du Monde.Fr
Merci 🙂